Au cours des derniers mois, nous avons vu de nombreuses initiatives de jeunes agriculteurs qui veulent être entendus et profiter de chaque occasion pour crier haut et fort leur message. Nous avons rencontré Frits Stevens de Hamont-Achel. Il est l’un des jeunes agriculteurs qui a déjà demandé un permis pour la construction d’une étable, et […]
Au cours des derniers mois, nous avons vu de nombreuses initiatives de jeunes agriculteurs qui veulent être entendus et profiter de chaque occasion pour crier haut et fort leur message. Nous avons rencontré Frits Stevens de Hamont-Achel. Il est l’un des jeunes agriculteurs qui a déjà demandé un permis pour la construction d’une étable, et dont le dossier n’a pas abouti à ce jour.
Ceux qui suivent l’actualité auront remarqué l’action par laquelle plusieurs agriculteurs ont envoyé un message à l’aide de leurs tracteurs, et sous la forme d’un cœur. Ils voulaient exprimer leur mécontentement au gouvernement au sujet de la désapprobation ou de la mise en attente des permis qu’ils ont introduits. Et en même temps faire savoir qu’ils se battront pour leur cause avec cœur et âme. Sans permis, il n’y aura plus d’agriculteurs et sans agriculteurs, il n’y aura plus de nourriture dans les étals.
Nous avons rendu visite à l’un des initiateurs de cette action dans la province du Limbourg. Frits Stevens représente la troisième génération sur la ferme familiale. Il a repris les rennes de l’exploitation après la mort subite de son père, et remarque qu’à l’heure actuelle, les permis doivent être approuvés de toute urgence afin de garantir la rentabilité de l’entreprise.
Frits Stevens: ‘Mon grand-père a fondé une exploitation mixte avec des poulets, des vaches et des porcs à l’engraissement. A l’époque, nous possédions déjà 12 hectares de terres que nous travaillons encore toujours maintenant. Mon père avait déjà repris l’exploitation, mais à cette époque, il allait encore travailler sur l’exploitation de son frère. L’accent était alors principalement mis sur les truies et les porcs à l’engraissement.’
Quelques années après que mon père ait repris la ferme, le deuxième poulailler a été construit pour une capacité de 30.000 poulets. A cette époque, mon père a pris la décision de seconder ma mère, qui travaillait déjà à temps-plein sur l’exploitation. En 2006, un troisième et un quatrième poulailler ont été ajoutées pour une capacité de 80.000 poulets. Ensuite, nous avons également pris la décision d’arrêter l’engraissement des porcs et de nous concentrer entièrement sur les poulets. Pour le moment, nous sommes toujours au même nombre. Les années ont passé et j’ai commencé à aider de plus en plus sur l’exploitation.’
‘En 2018, mon père est décédé subitement, laissant toute la responsabilité sur mes épaules et celle de ma mère. Ma mère s’est occupée de la comptabilité et je me suis occupé des tâches à la ferme. J’ai reçu beaucoup d’aide théorique d’un aviculteur des environs parce qu’il n’était certainement pas facile de reprendre toutes ces tâches en une fois. En 2020, j’ai progressivement repris les formalités administratives et il y a un an, ma mère a quitté l’exploitation et ma compagne Hanne a emménagé à la ferme. Hanne a son propre travail, mais m’aide dans les poulaillers lorsqu’il y a beaucoup de boulot. Mais elle va continuer à travailler à l’extérieur. Le soutien mental est la chose la plus importante pour moi.’
Frits: ‘Avec les tâches que je dois accomplir dans des circonstances normales, je passe environ 6 heures par jour sur ma propre exploitation, y compris les formalités administratives. Lorsque les poulets sont adultes, partent et que de nouveaux poussins arrivent, le planning est chargé. Et lorsque la routine reprend, il est possible de faire d’autres tâches entre les deux. Dans les périodes moins occupées, je travaille aussi pour l’entreprise agricole Gebroeders Dewit à Neerpelt. Si nous pouvions grandir, bien sûr, les choses seraient différentes et il y aurait assez de travail pour vivre et il serait difficile de continuer à rouler en entreprise.’
Frits: ‘En 2014, nous avons introduit notre première demande et elle a été rejetée suite aux protestations de voisins et d’autres situations. En 2018, quand mon père était vivant, nous avions déjà prévu de grandir. Les dossiers ont été préparés et introduits en 2019, mais ici aussi nous n’avons pas obtenu de réponse positive. L’affaire a été déclenchée par des protestations des autorités et des voisins. Cela signifie que nous n’avons que des incertitudes suite à la législation PAS (Approche programmatique de l’azote). Quelle voie voulons-nous prendre avec l’agriculture et sera- t-il encore possible de poursuivre notre expansion en tant que jeune exploitation à l’avenir. Le dossier est là, mais il ne bouge pas.’
Frits: ‘En effet. Beaucoup de jeunes agriculteurs veulent prendre le relais ou travailler sur l’exploitation familiale, mais sans travail supplémentaire ce n’est évidemment pas rentable. En tant qu’agriculteurs, nous obtenons souvent le commentaire que nous rejetons trop de CO2 avec nos animaux, mais un débat honnête à ce sujet n’est pas envisageable. La demande de permis a également lieu par l’intermédiaire de diverses organisations, ce qui signifie que la réponse prend beaucoup de temps. C’est pourquoi il est recommandé de faire une demande bien à temps.’
Frits: ‘D’abord et avant tout, elle va dans votre propre commune. Lorsque la commune a donné son avis, elle va à la province. Vous obtiendrez votre demande de permis. Elle doit être affichée pendant un mois après lequel vous pouvez commencer à construire sans objection. C’est le scénario idéal. S’il y a une objection, elle est transmise au ministre et il peut quand même accorder ou rejeter le permis. Ensuite, vous avez 30 jours à nouveau et on peut s’opposer à nouveau. Au pire, le dossier est devant le tribunal des litiges relatifs aux permis. Il a indiqué à l’époque que les études que nous avions menées sur les données sur l’azote n’étaient ni correctes ni étayées. C’est à ce niveau que tout s’est compliqué pour chaque agriculteur. Bien sûr, cela aura également un impact sur l’industrie qui dépend de l’agriculture.’
Frits: ‘On se sent abandonné. Selon notre activité, nous assurons directement ou indirectement les besoins en nourriture de la population. Bien sûr, il faut réduire les émissions, mais cela doit être vivable et réalisable. En ce moment, nous nous dirigeons vers un bain de sang financier et économique. Nous sommes encore plus que quiconque partie prenante pour un environnement vert et sain d’autant plus que nous y avons grandi et que nous apprécions cela encore plus que quiconque. Après tout, c’est notre biotope quotidien.’
Frits: ‘Je suis certainement coincé en ce moment et je ne peux pas évoluer à cause de ces décisions. Il faut avoir 120.000 poulets pour avoir une entreprise vivable. Nous avons fait des calculs et demandé conseil, mais je n’ai pas d’entreprise viable en ce moment. Si je continuais à travailler pendant 10 ans pour m’arrêter ensuite, ce serait faisable; mais j’ai au moins 40 ans de plus à faire pour avoir un revenu décent.’
Frits: ‘Nous soulignons le problème avec des actions ludiques. Nous ne voulons pas créer une fausse image et juste montrer notre positivité. Nous avons commencé par des images aériennes qui diffusent un message dans toute la Flandre et nous avons essayé de déranger les automobilistes le moins possible. Plusieurs chaînes de télévision locales ont pris la peine d’écouter notre message. En outre, en été, nous avons mis en place des mannequins dans toute la Flandre pour que les gens puissent s’émerveiller quand ils marchent le long des champs. En ce moment il y a une action avec des autocollants pour attirer l’attention. De plus, des bannières ont été placées sur le bord de la route avec un message sur notre avenir. Nous avons également attiré l’attention avec ces bannières dans le tour des Flandres. Notre message est de réveiller les ministres et de leur faire prendre conscience que la nouvelle loi fait que notre avenir sera tout sauf rose.’
Frits: ‘La demande n’est pas le problème, c’est plutôt ce qu’ils nous imposent. Nous devons nous adapter et faire tellement de choses qui rendent impossible sa mise en pratique. Certaines règles vous font également vous sentir doublement découragé. Personnellement, je crois également que les demandes de l’agriculture et de l’industrie devraient en principe être traitées de la même manière. Et ce n’est pas le cas pour le moment.’
Frits: ‘Dans sa globalité, le monde agricole émet davantage de rejets que l’industrie, mais nos cultures absorbent aussi beaucoup plus d’azote, ce qui nous rend circulaires et ce que l’on ne peut pas dire du tout de l’industrie. Il s’agit d’un point important qui est rapidement rejeté alors que les études l’appuient. Une étude menée par les Pays-Bas a montré que chaque agriculteur permet de faire travailler 10 personnes; de la laiterie à l’abattoir et à la distribution. Supprimez l’agriculture et une grande partie de l’industrie va disparaître. C’est souvent oublié.’
Frits: ‘Bien sûr qu’il y en a toujours. Mais ce qui semble normal pour une personne ne l’est tout simplement pas pour l’autre. S’ils appliquent la loi comme elle est écrite maintenant, de plus en plus d’agriculteurs vont arrêter. Si vous voulez cultiver dans un certain endroit, vous pouvez le faire, mais dans une autre province, vous ne pouvez pas obtenir gain de cause pour un dossier semblable.’
Frits: ‘Nous n’allons pas abandonner et nous allons continuer à nous battre pour ce que nos parents ont construit pour que les gens puissent encore profiter de la nourriture fraîche produite au champ. Nous espérons toujours une perspective d’avenir positive avec une législation claire et durable qui soit réalisable pour toutes les parties.’