A Petit-Enghien, la Ferme de Warelles est exploitée par Etienne Allard et son épouse Catherine. Ils sont aidés par leurs deux fils. Cette exploitation mixte typique de la région allie un élevage laitier et des grandes cultures. Depuis plusieurs années, Etienne réfléchit à des solutions plus durables pour son exploitation et les implémente petit à […]
A Petit-Enghien, la Ferme de Warelles est exploitée par Etienne Allard et son épouse Catherine. Ils sont aidés par leurs deux fils. Cette exploitation mixte typique de la région allie un élevage laitier et des grandes cultures. Depuis plusieurs années, Etienne réfléchit à des solutions plus durables pour son exploitation et les implémente petit à petit. Une bonne partie du lait est ainsi valorisée en circuit court, tandis qu’une partie des céréales sont transformées en farine depuis peu. De son côté, Catherine accueille régulièrement des enfants pour leur expliquer la vie à la ferme et elle vend également les produits de la ferme dans le petit magasin aménagé dans le corps de ferme.
Lorsque son père décède en 1983, Etienne termine ses études pour revenir sur l’exploitation et assurer la continuité de l’exploitation avec sa maman. Le métier lui plait et il décide donc de rester sur l’exploitation. Etienne poursuit : ‘A l’époque, nous avions un quota de 120.000 litres de lait et nous cultivions 60 hectares. Petit à petit l’exploitation s’est agrandie tant en surface qu’en production laitière pour arriver à 120 ha et 550.000 litres. Ensuite, j’ai repris la ferme avec mon frère en 1996. Suite à la modernisation des méthodes de travail, il n’y avait cependant plus assez de travail pour deux et j’ai donc repris la totalité de l’exploitation en 2004. Outre les céréales d’hiver, l’assolement comporte des pommes de terre, des betteraves sucrières, de la luzerne, des prairies temporaires, du maïs ainsi que de la féverole depuis cette année. En ce qui concerne les pommes de terre, je fais partie d’une coopérative de stockage située à Hoves.’
La production laitière du troupeau pie noir Holstein est comprise entre 9.000 et 9.500 litres par an. Comme le souligne Etienne, la génétique n’est pas le focus principal, mais il convient cependant de travailler correctement. Par ailleurs, un robot de traite assure déjà la traite depuis 2007 sur l’exploitation. Le troupeau est quasi exclusivement nourri sur base des cultures de l’exploitation. Etienne : ‘Nous essayons de valoriser au mieux nos cultures. La ration des vaches se compose de fourrages préfanés (luzerne, trèfle, fétuque…), de même que de maïs épi broyé, de pulpes surpressées et de drèches de brasserie. Notre remorque mélangeuse permet d’assurer un mélange homogène de cette ration. Un mélange de lin et d’avoine est de plus distribué au robot.’ Suite à la crise du lait en 2009 et des manifestations qui s’en sont suivies, Etienne et 2 autres agriculteurs ont eu l’occasion d’avoir une entrevue avec un représentant de la direction du groupe Colruyt. ‘Après un échange des points de vue sur le manque de rentabilité de la production laitière, il nous est demandé de leur proposer un produit différent; non présent dans leurs rayons. Une laiterie proche du centre de distribution peut nous faire du lait frais pasteurisé. C’est le début d’une belle aventure, et nous livrons encore toujours une partie de notre lait sous la marque du distributeur.’
Depuis 2015, et suite à un diagnostic énergétique de l’exploitation, il a été décidé de placer une micro méthanisation au départ du lisier produit. ‘Aujourd’hui, et après des débuts difficiles, nous sommes autonomes à 75 % de nos besoins en électricité avec une alimentation journalière de 5 m3 d’effluents.’
D’autre part, Etienne Allard mise beaucoup sur l’agriculture de conservation des sols. ‘Cela fait 20 ans que nous travaillons dans ce sens et que nous avons pris conscience de la nécessité de mieux respecter le sol. En automne, nous avons également réalisé nos premiers essais en semis direct et les résultats s’annoncent prometteurs. D’autre part, cela fait longtemps déjà que je planche sur la fumure la plus adaptée pour chaque culture et la limitation des intrants, de même que sur la couverture permanente des sols. Toutes ces mesures ont un impact sur la santé de nos sols, mais également sur la qualité des produits qui sortent de l’exploitation. Je suis d’avis que la chimie a été nécessaire parce qu’on maltraitait les sols (tant en ce qui concerne le travail du sol que les fumures), mais qu’il y a moyen de faire beaucoup mieux à présent. Je suis régulièrement des formations dans ce sens en France, vu que la Belgique ne propose malheureusement pas de telles formations. Je réalise par ailleurs pas mal d’essais sur mon exploitation, comme par exemple en associant des betteraves à de la féverole. Je participe aussi au projet ‘Farming for climate’,qui a pour but de mettre en lien agriculteurs qui par leur pratiques sont dans un système de production durable et industriel soucieux de soutenir notre profession en transition. Il est acquit à ce jour que cette manière de faire valoir nos sols capte plus de CO2 qu’elle n’en émet. C’est un sujet d’actualité, et je pense de plus que la seule solution pour nous garantir un avenir sur le long terme est de faire partie de la solution en ce qui concerne le réchauffement climatique. Pour être performant en termes d’agriculture de conservation, il convient cependant de bien se faire entourer pour assurer cette transition.’
Afin de réduire les charges de mécanisation, Etienne a décidé de fonder une Cuma avec 3 autres agriculteurs des environs. Cette Cuma n’emploie pas de personnel et chaque agriculteur est en quelque sorte responsable de certaines machines. C’est ainsi qu’Etienne est responsable de l’arracheuse de pommes de terre et de la chargeuse de betteraves. L’automne est donc une période chargée, avec les arrachages de betteraves et de pommes de terre, les semis de céréales et les vêlages, mais une bonne organisation de travail permet de mener tout à bien si la météo ne nous pose pas trop de problèmes. Cette Cuma dispose par ailleurs de la totalité des machines pour les différentes spéculations tant fourragères que pour les cultures de vente, du semis à la récolte et ensilage.
De son côté, Catherine est enseignante de formation et a toujours bien aimé les contacts humains. Pour elle, il était donc logique de réfléchir au développement d’une activité dans ce sens. C’est ainsi que la ferme pédagogique a vu le jour il y a 25 ans. ‘Notre but n’est pas de montrer une ‘ferme zoo’, mais bien d’expliquer aux jeunes et aux moins jeunes comment se déroule la vie réelle à la ferme, comment nous soignons nos animaux, comment nous prenons soin de nos cultures, etc…’
L’activité la plus récente est la production de farine au départ des céréales produites sur l’exploitation. Tout a commencé par un contact avec un boulanger qui voulait pouvoir travailler avec un producteur de céréales locales. ‘Les premiers contacts ont eu lieu en décembre 2018 et quelques jours après on semait des variétés adaptées pour débuter la livraison de grains entiers en septembre 2019. Après quelques mois, notre boulanger (Les pains de Stéphane à Enghien) nous a proposé de faire directement la farine, et depuis fin octobre 2020 un moulin sur meules de pierre transforme nos céréales en farine. Cette technique de mouture donne une qualité de farine supérieure, grâce à la température de mouture plus faible qu’en meunerie traditionnelle. Cette activité prend petit à petit de l’ampleur et l’étape suivante consiste à mieux faire connaître nos produits aux revendeurs et aux consommateurs intéressés.’
Etienne conclut : ‘S’ils veulent se garantir un avenir, les agriculteurs doivent évoluer et gagner en autonomie de décision. Ils ont en effet trop délégué par le passé. Il est par ailleurs nécessaire de se remettre en cause en permanence. Il existe des solutions, mais cela nécessite d’envisager les choses autrement. C’est la philosophie que nous essayons d’implémenter chaque jour sur notre exploitation.’