A la base, l’exploitation de Bernard Bartholomé était typique pour la région : un élevage laitier et des grandes cultures. Au fil des ans, la ferme grandit au fil des opportunités qui se présentent, avant que Bernard ne décide d’envisager les choses de manière radicalement différente afin de préserver son autonomie d’entreprendre, mais également de […]
A la base, l’exploitation de Bernard Bartholomé était typique pour la région : un élevage laitier et des grandes cultures. Au fil des ans, la ferme grandit au fil des opportunités qui se présentent, avant que Bernard ne décide d’envisager les choses de manière radicalement différente afin de préserver son autonomie d’entreprendre, mais également de dégager davantage de marge, et donc d’assurer la rentabilité de son exploitation. Aujourd’hui, la Ferme du Tambourin est certifiée bio et mise sur la transformation du lait issu de son troupeau de Jersiaises. Nous avons rencontré Bernard par une belle matinée d’été.
Bernard Bartholomé reprend l’exploitation de ses parents en 1991. Elle compte alors 30 ha et un quota laitier de 250.000 litres. La ferme va ensuite grandir, jusqu’à compter 80 ha et une production annuelle de 1.000.000 de litres de lait. Bernard poursuit : ‘Nous étions dans une logique de croissance continue, sans trop nous soucier du reste. C’est alors que la crise du lait arrive sans crier gare en 2009. Nous avons perdu beaucoup d’argent en peu de temps, mais en même temps, cela nous a forcés à remettre beaucoup de choses en question et à envisager les choses de manière différente. Je me suis donc peu à peu intéressé au marché du lait transformé. Après avoir planché sur différentes possibilités, la première diversification dans le domaine du lait fermenté est envisagée en 2012. Pour cela, j’avais acheté un conteneur ainsi que du matériel d’occasion. Nous avons fourni du lait fermenté en région bruxelloise pendant un an, avant d’abandonner cette piste, car elle n’offrait pas de valeur ajoutée. Au cours de la même année, nous avons également commencé à vendre nos produits sur les marchés locaux. Le maître-mot de ce développement était, et reste: que faire pour se différencier des autres, tout en proposant un produit de qualité. Les consommateurs sont en effet prêts à payer davantage pour certains produits, et cela nous permet donc de dégager de la marge. Pour ce faire, il est cependant nécessaire de bien connaître sa clientèle.’
Pour Bernard, c’est le début d’une grande aventure, et bien vite, il décide d’élargir sa gamme de produits transformés. En plus du fromage frais, il produit également des yaourts, des desserts, etc… et il démarre la collaboration avec ‘La Ruche qui dit oui’ à Forest. Il poursuit : ‘Cela nous a permis d’écouler de plus grandes quantités de produits finis, mais également de développer de nouveaux partenariats, notamment avec Delitraiteur. En 2018, une rencontre avec Pascal Léglise de chez Carrefour va donner
un nouveau boost à notre activité. La marque était en effet à la recherche de producteurs voulant se concentrer sur le bio. Pour ce faire, elle était même prête à proposer une prise en charge partielle et participer à l’accompagnement. De notre côté, et suite au développement de la transformation, nous remettions de plus en plus en question le ‘système traditionnel’, et cela nous a donc permis de passer le cap plus facilement. A l’heure actuelle, nous livrons une petite partie de notre production chez Delhaize, nous vendons dans des magasins bio spécialisés et nous avons également un contrat national avec Carrefour. Par ailleurs, nous avons également misé sur le catering scolaire et les homes, afin de mieux répartir les risques.’
En 2018, Bernard Bartholomé décide de changer de race de vaches, afin de disposer d’un lait de meilleure qualité pour la transformation. Le troupeau Holstein cède donc sa place à des Jersiaises. ‘Cette race laitière est peu connue chez nous, mais propose cependant de nombreux avantages, comme la qualité et la richesse du lait, son goût, sa teneur en protéines, matière grasse et oligo-éléments ou encore son équilibre entre oméga 3 et oméga 6. Par ailleurs, ce lait est riche en protéine A2, ce qui le rend plus digeste. Ce changement d’orientation va de pair avec le passage en bio. Depuis cette année, nous sommes certifiés en bio pour la production laitière. De plus, les Jersiaises transforment le mieux la fibre en matière utile. De ce fait, nous avons quasiment abandonné les ensilages et notre troupeau est nourri à base de foin récolté sur l’exploitation. Cette année- ci, il n’est pas évident de faire du foin entre les averses, mais ce foin permet de disposer d’un lait plus adapté pour la transformation. En plus du foin, la ration des vaches comporte des céréales produites sur l’exploitation, et éventuellement un complément protéique si nécessaire. Nous évitons tant que possible le soja. Par ailleurs, les vaches restent tant que possible en prairie. Nous avons implanté nos prairies ‘à l’ancienne’, avec un mélange multi-espèces (trèfle, luzerne, fétuque…).’
Les premiers investissements dans la transformation remontent en 2012. Le premier conteneur réfrigéré a ensuite été rejoint par un second, et l’exploitation dispose d’une gamme complète de machines, dont une écrémeuse, deux pasteurisateurs en cuve dont un plus spécifique pour les produits plus visqueuse, différentes cuves à fromage ou encore une emballeuse capable de débiter jusqu’à 2.000 pots par heure. Depuis, l’ensemble de la production laitière, soit près de 200.000 litres sur base annuelle, est transformée dans l’atelier de la ferme. Les produits finis sont très variés, avec du fromage frais, du yaourt, du yaourt à boire, du riz au lait, du pudding, du beurre…
La Ferme du Tambourin compte des prairies permanentes et une trentaine d’hectares de céréales. Il s’agit de mélanges triticale- avoine-pois ou épeautre-avoine-pois. Bernard : ‘Comme nous nous concentrons sur la production laitière et la transformation, nous avons décidé de confier la quasi-totalité des travaux sur les terres à Fabrice Stragier, un entrepreneur de la région. A première vue, cela peut sembler démesuré, mais lorsqu’on calcule de plus près les coûts liés à l’investissement dans une faucheuse, une faneuse, un andaineur, etc… l’entreprise revient bien meilleur marché. De plus, cela permet de disposer de matériel de grande capacité et donc de travailler plus vite, un atout non-négligeable lorsque la météo est plus capricieuse, comme c’est le cas cette année. Par ailleurs, je préfère consacrer mon temps à la gestion de mon troupeau et au suivi de la transformation, plutôt qu’à conduire un tracteur.’
C’est en 2009, suite à la crise du lait, que Bernard Bartholomé a commencé à réfléchir plus en détails sur la création de valeur ajoutée et le dégagement de marges suffisantes pour vivre et investir. ‘Cela a été une démarche de longue haleine, parsemée d’embûches, et je continue à apprendre tous les jours. La clef du succès consiste à bien s’entourer et à ne pas avoir peur de se remettre en question. A mes yeux, il est par exemple primordial de pouvoir compter sur un comptable correct, et c’est souvent un souci à l’heure actuelle. Par ailleurs, il est important de bien analyser la rentabilité de chaque produit fini, car sinon on perdra vite de l’argent. Les différents partenariats que nous avons mis en place avec des distributeurs belges nous permettent de faire tourner notre atelier de transformation tout au long de l’année. Afin de combler le manque à gagner durant les mois d’été traditionnellement plus calmes, nous réfléchissons également à la possibilité de fournir l’horeca. Enfin, les différents marchés hebdomadaires sur lesquels nous sommes présents nous permettent de garder un contact direct avec le consommateur final, mais également de tester de nouveaux produits et de les améliorer avant de les proposer aux grands distributeurs.’