Renon pour exploitation personnelle : qu’en est-il de l’engagement temporel ?

29 août 2022

Il y a beaucoup de résiliations pour usage personnel ! Les propriétaires/preneurs donnent un renon pour eux-mêmes ou pour un descendant, mais le preneur n’aime généralement pas cela. Car… l’exploitation de la ferme de ce descendant constitue-t-elle une « partie prépondérante de son activité professionnelle » comme l’exige la loi sur le bail à ferme […]

Il y a beaucoup de résiliations pour usage personnel ! Les propriétaires/preneurs donnent un renon pour eux-mêmes ou pour un descendant, mais le preneur n’aime généralement pas cela. Car… l’exploitation de la ferme de ce descendant constitue-t-elle une « partie prépondérante de son activité professionnelle » comme l’exige la loi sur le bail à ferme ?

Que dit la loi sur la loi sur le bail à ferme?

Lors de la demande en validation du congé, le juge apprécie si les motifs du congé sont sérieux et fondés et notamment s’il appert des circonstances de la cause que le bailleur mettra à exécution les intentions énoncées comme motifs de congé.

En outre, quand le preneur exerce la profession agricole à titre principal, le juge ne pourra valider le congé en vue de l’exploitation personnelle que si l’exploitation de l’entreprise agricole dans laquelle les biens ruraux en question seront exploités, constituera une partie prépondérante de l’activité professionnelle (de la personne ou des personnes indiquées dans le congé devant assurer l’exploitation et, en outre, s’il s’agit de personnes morales, la ou les personnes qui dirigent l’activité en qualité d’administrateur ou de gérant).

En cas de contestation sur le caractère sincère de l’exploitation personnelle, il appartiendra au bailleur de préciser comment la personne ou les personnes indiquées dans le congé comme devant assurer cette exploitation entendent le faire de façon personnelle, effective et continue et de prouver qu’elles sont en mesure de le faire.

En ce qui concerne l’importance de l’activité agricole, le bailleur qui donne congé doit faire de l’exploitation agricole une « partie prépondérante de son activité professionnelle » ». En outre, il doit le faire dès qu’il commence à cultiver. Il n’est donc pas nécessaire qu’il le fasse au moment de la notification.

Cependant, la loi ne prévoit pas de règles d’appréciation de la notion « partie prépondérante de l’activité professionnelle » et cette notion n’est pas non plus définie par la loi sur le bail à ferme. Il appartient ensuite au juge en pratique de se prononcer sur ce concept.

Parfois, lors de la détermination de cette condition, le revenu de l’activité agricole est pris en compte, bien qu’il ne soit pas nécessaire que ce revenu de l’activité agricole soit supérieur à celui de l’autre activité ! Mais… la plupart du temps, le temps consacré à l’activité agricole est pris en compte !

Un cas vécu !

Jean achète un terrain de 5 hectares qui est loué à l’agriculteur Wim. Après l’achat, le propriétaire Jean, donne à Wim un préavis de résiliation pour exploitation personnel. Cependant, Wim n’a pas accepté ce renon ; lors de la réconciliation devant le juge de paix , ils ne sont pas non plus parvenus à un accord. De ce fait, propriétaire Jean assigne Wim afin de faire déclarer la validité de son renon pour exploitation personnel.

Wim, le preneur, est d’avis que Jean n’est pas un fermier ; il a bien sa propre entreprise, mais certainement pas une entreprise agricole ! En outre, Wim est d’avis que, si Jean fait quelque chose dans le sens de l’agriculture, il ne le fait certainement pas à titre principal, de sorte qu’il ne tire pas la majorité de son activité professionnelle de l’agriculture, bien que, dans ces circonstances, cela soit imposé par la loi sur le bail à ferme.

De son côté, le bailleur Jean ne nie pas qu’il a un commerce en électricité, mais il possède aussi plusieurs hectares de terre, qu’il cultive en tant que fermier. Il estime qu’il remplit toutes les conditions imposées par la loi sur le bail à ferme concernant un renon pour son exploitation personnel, notamment le fait que la personne qui résilie pour usage personnel doit tirer la majorité de son activité professionnelle de l’agriculture !

Que décide le juge ?

Tenu compte des éléments de preuve de cette affaire, le juge de paix a décidé que le bailleur Jean exploite bien une entreprise agricole, qu’il le fait personnellement et qu’il est également le « gérant » de son entreprise agricole. Il peut, par exemple, faire appel à des entrepreneurs agricoles, tant qu’il continue à gérer lui-même son exploitation, ce qui est le cas ici selon le juge de paix. En voyant les déclarations fiscales, le juge de paix en déduit que l’exploitation de Jean est effectivement orientée vers le marché.

Le juge note que la loi sur le bail à ferme ne précise pas ce qu’il faut entendre par là !
Par conséquent, le juge considère que l’activité de la personne qui notifie pour son propre usage (Jean) ne doit pas avoir un caractère « prépondérante », mais un caractère non limité ou seulement occasionnel. Le juge estime que le temps que Jean consacre à son activité agricole doit être pris en compte. Dans ce cas, le juge considère qu’une partie prépondérante de son temps consacré à l’activité agricole est plus importante qu’une partie prépondérante de ses revenus !

Le juge décide pour toutes ces raisons que le renon pour exploitation personnel de Jean est valable et que Jean remplit toutes les conditions fixées par la loi sur le bail à ferme !